Verrières-le-Buisson renature d’une main bétonne de l’autre
Huit cent soixante mètres séparent le pré de la Tournelle du square Léon-Maugé. Ces deux terrains appartiennent à la ville de Verrières-le-Buisson, commune du nord de l’Essonne carencée en logements sociaux. Le pré est promis au béton et le goudron sera renaturé.
Ici, une prairie naturelle de 1 500 m² épargnée par la densification, grâce au ruisseau enterré qui la traverse. Répertoriée « espace vert à affirmer » dans le plan local d’urbanisme (PLU), elle fait partie de la trame verte définie en 2017.
Là, un terrain goudronné de 2 500 m², en marge d’un square de 1 500 m². Le PLU de 2019 prévoit de construire dans ce quartier pavillonnaire une vingtaine de logements, dont 40% sociaux.
En campagne pour les municipales de 2020, François-Guy Trébulle promet aux riverains l’annulation de ce projet. Mais, une fois élu, il lui faut relocaliser les logements sociaux imposés par la loi SRU… Son choix se porte sur le pré de la Tournelle, dans un quartier déjà pourvu de logements collectifs.
En 2021, le maire préempte une parcelle construite qui le jouxte, puis annonce la construction d’un foyer de trente-six logements sur le pré. « Il n’y aura pas de concertation », déclare-t-il aux Voisins du pré qui se constituent en association. Leur demande ? Protéger le pré et construire les logements seulement sur la parcelle préemptée, déjà artificialisée.
Artificialisation et subventions
Pour le maire, pas de débat possible : le pré est un terrain à bâtir, réserve foncière d’une ville vouée à se densifier. Pour les Voisins du pré, cet espace public est un refuge pour la biodiversité, en particulier pour les insectes, dont certains sont protégés : mante religieuse, sauterelle verte, flambé… Corridor écologique fonctionnel, il est d’autant plus précieux qu’il est une ancienne prairie humide et abrite toujours un affluent de la Bièvre.
En parallèle, après avoir testé le concept sur deux cours d’écoles, la ville annonce la renaturation du terrain Léon-Maugé. Elle a un coût. Entre 95 €/m² et 390 €/m² désartificialisé et renaturé selon France Stratégies, soit entre 237 500 € et 975 000 €, pour lequel la Ville sollicite la Région, via le dispositif « Retour de la nature en ville » d’Ile-de France Nature.
Sortir du non-sens écologique et économique
La renaturation du terrain Léon-Maugé ne permettra pas la restauration de la vie du sol ni des services écosystémiques avant de très longues années. La destruction du pré de la Tournelle supprimera définitivement une prairie urbaine riche en biodiversité, dotée d’un ruisseau.
À Verrières-le-Buisson, le PLU est actuellement en cours de modification : il doit faire des trames vertes, bleues et noires une réalité tangible, réglementaire et opposable capable d’encadrer l’urbanisation et de renforcer les liens des habitants avec leur environnement naturel.
Claire GUHA
Présidente de l’association des Voisins du pré