Gestion sylvicole francilien
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Une mise à jour nécessaire du schéma régional de gestion sylvicole francilien

Publié le 13 juillet 2022

Le schéma régional de gestion sylvicole francilien 2022                                  

FNE-Ile-de-France est la fédération régionale des associations franciliennes de protection de la nature et de l’environnement. Elle est le porte-parole de plus de 400 associations, unions ou collectifs départementaux et locaux. Membre de la fédération nationale France Nature Environnement, FNE Ile-de-France est son représentant régional.

Créée en 1974, elle est régie par la loi de 1901, agréée environnement depuis 1981 et habilitée au dialogue environnemental au niveau régional depuis 2012. Elle est indépendante de tout mouvement confessionnel, syndical, économique ou politique.

Face aux menaces qui pèsent sur l’environnement, notre union défend l’intérêt général, intervient auprès des décideurs par des contacts réguliers, propose des solutions pour concilier activités humaines et équilibres naturels, assure la représentation des associations de protection de la nature et de l’environnement dans de nombreuses instances de concertation et consultatives, agit en justice.

Avis résumé de FNE-Ile de France sur le SRGS

La fédération régionale d’associations de protection de l’environnement demande que la gestion de la forêt francilienne soit raisonnée, que sa surface s’accroisse tout en augmentant la surface terrière et en adaptant les essences au réchauffement climatique et à la sécheresse.

Elle est favorable à un accroissement de l’utilisation du bois d’œuvre pour la construction.

Elle s’oppose totalement à la croissance de la filière bois-énergie dont le principe repose sur une dangereuse erreur d’interprétation de la notion d’énergie renouvelable.

 

Le Schéma régional de gestion sylvicole

Le SRGS s’adresse à la propriété forestière privée qui occupe 174 000 ha soit 15,2 % de la surface régionale. Ces forêts sont très morcelées avec 30 % de surface de moins de 4 ha, 25 % comprise entre 4-25 ha et 1000 de plus de 25 ha soit 45 % de la surface forestière privée. Elles sont aussi possédées par 148 000 propriétaires dont 96 % d’entre eux possèdent moins de 4 ha. Les massifs forestiers sont répartis dans les quatre départements de la grande couronne francilienne.

Des imprécisions et des mises à jour nécessaires

Le SRGS est imprécis sur la quantité de bois qui pourrait être disponible annuellement. En effet, bien que la production biologique annuelle soit de 1,4 million de m3/an mesurée en 2016, celle-ci est associée à une mortalité de 0,2 million de m3/an, l’accroissement biologique n’est plus que de 1,2 million de m3/an selon le Plan régional de la forêt et du bois.

Ainsi, il est annoncé 29,7 millions de m3 de bois vivant sur pied…Or, le graphique qui détaille le volume de bois sur pied par essence donne par addition de toutes les essences près de 44 millions de m3 sur pied. La nomenclature des essences est peut-être mal appropriée, cela doit être clarifiée.

Concernant, la pluviométrie en Ile-de-France, elle est à surveiller attentivement car elle baisse sensiblement et les chiffres annoncés pourraient drastiquement diminuer.

Sur les pathologies frappant les différentes essences, le hêtre est touché depuis pas mal d’années par le manque de pluviométrie…pour le châtaignier qui n’est pas une essence autochtone mais importée au 15 ème siècle du pourtour méditerranéen, c’est l’encre qui est en cause…Toutefois, les chênes sont aussi touchés par l’encre et la sécheresse.

Compte tenu de ces observations critiques, la réévaluation complète des capacités forestières évaluations quantitatives et des risques potentiels qui avec le réchauffement climatique s’annoncent très sévères.

La gestion des forêts privées

L’Etat dans ses plans nationaux sur les forêts a préconisé depuis longtemps, la possibilité que des petits propriétaires de surfaces forestières contiguës puissent se regrouper au sein de Groupement forestier ce qui permettrait une meilleure gestion. Sans une meilleure organisation le SRGS restera un moment de convivialité sans effets pratiques comme cela se passe depuis plus de 40 ans.

Ce type de collaboration fonctionne bien dans le domaine agricole.

  •             L’exploitation forestière en plein réchauffement climatique

Deux propositions de la gestion privée paraissent aller à l’encontre des demandes du GIEC : diminuer la surface terrière va faire baisser les capacités de la forêt à capter du carbone et modifier l’écosystème forestier tant du point de vue végétal qu’animal et microorganisme, ouvrir plus de chemins de passage pour les gros engins tant abatteuses que débardeurs revient aussi à diminuer les potentialités de la forêt tout en tassant le terrain ce qui crée des ruptures dans les communications de la couche humifères.

Il serait plus intéressant de mettre rapidement une gestion forestière de type futaie irrégulière et surtout d’éviter les coupes à blanc (ou coupes rases) qui sont mal perçues par nos concitoyens. Une gestion par petite zone de quelques ha entre coupés de bosquets serait mieux accueillie.

  •             Les bois d’œuvres et d’industrie

Ces deux débouchés pour les bois franciliens sont en train de péricliter faute d’une filière complète du bucheronnage à la scierie. Or, plusieurs pays européens : Allemagne, Autriche, Suisse ont entrepris de développer la construction de logement à dominante bois. Les bois utilisés sont les bois locaux et pas uniquement des résineux…l’utilisation de résineux est la solution de facilité mais ne se rapportant pas aux capacités de la région. Le bois d’œuvre de feuillus a donné des poutres et chevrons qui ont une durée de vie plusieurs fois centenaires. Le développement soutenable de la forêt est au prix d’une reconstitution de la filière mais aussi des pratiques de construction. Ce sont ces pratiques qu’il faut valoriser car elles conduisent à stocker durablement du carbone.

  •             La filière bois de chauffage

Elle est en plein expansion en raison d’une hausse du coût des énergies fossiles…la production francilienne est très largement déficitaire par rapport à la demande. Faut-il pour cela augmenter la récolte de bois bûches et plaquettes ? Il est rappelé qu’il est possible d’utiliser toutes les parties d’un arbre pour la construction, les sections faibles et les branches pouvant servir à faire du contreplaqué…Tout en n’oubliant pas de laisser au sol les branches inférieures à 7 cm de diamètre qui fourniront l’engrais de la future forêt.

Le bois de chauffage des particuliers hors zones densément peuplées

On peut imaginer que des particuliers vivant en zones rurales et pourvu de système de combustion à haut rendement puissent utiliser du bois pour se chauffer. Mais il faut se rappeler que la combustion du bois en Ile de France produit autant de particules que le trafic routier mais aussi beaucoup plus de composés organiques volatils très toxiques. La consommation de bois buches est en train d’exploser avec déjà 1,5 million de m3/an dont plus de la moitié est importée.

Le bois de chauffage des centrales alimentant soit des immeubles en zones urbaines ou des réseaux de chaleur

Les besoins en bois de chauffage (plaquettes) sont trois à quatre fois supérieures à la production francilienne actuelle. Augmenter cette production de bois de chauffage sera un non-sens environnemental et climatique. Les 107 chaufferies biomasse en activité consomment plus de 700 000 tonnes de bois (1,5 à 2 millions de m3) et il y en a des dizaines d’autres en projet.

Il est rappelé que la combustion du bois émet deux fois plus de gaz à effet de serre que le méthane et trois fois plus quand il est importé des USA ou du Canada. Sa combustion est pratiquement plus sale que celle du charbon.

Les scientifiques spécialistes de la vie végétale (Denis Couvet, Wolfgang Cramer, Timothy Searchinger : La stratégie climatique de l’UE va accroître la déforestation à l’échelle mondiale, Le Monde 06/07/2022) dénoncent la mauvaise interprétation de la notion d’énergie renouvelable. Le temps mis par la forêt pour se reconstituer après avoir servi de combustible n’est jamais pris en compte. Des temps de 80 à 120 ans pour les feuillus ou de 40 à 60 ans pour les résineux et phénomène plus grave, ces combustions de bois se déroulent chaque année ce qui veut dire que l’on repousse année après année la reconstitution de la forêt.

Conclusion

FNE-Ile de France n’est pas opposée à une gestion raisonnable de la forêt francilienne mais s’oppose à toute diminution de la surface terrière et demande au contraire une augmentation de la surface des forêts franciliennes en tenant compte de l’adaptation des essences au changement climatique.

FNE-Ile de France demande que le message du GIEC et des scientifiques spécialistes de la forêt soit pris en compte, c’est-à-dire l’augmenter au moins d’un quart.

FNE-Ile de France s’oppose totalement à la filière Bois-énergie en raison de sa non prise en compte du temps de renouvellement de la biomasse. Dans ces conditions, le bois n’est pas une énergie renouvelable et son utilisation doit être priorisée vers le bois d’œuvre.

 

Pour France Nature Environnement-Ile de France

Michel RIOTTOT

Président d’honneur de FNE-Ile de France

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