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Baignade en Seine : ce n'est pas un long fleuve tranquille !

Publié le 9 juillet 2025

Depuis le 5 juillet 2025, la baignade est officiellement de retour dans la Seine, un siècle après son interdiction. À Paris comme dans plusieurs sites franciliens (Joinville-le-Pont, Maisons-Alfort, Créteil…), l’accès à la rivière est désormais autorisé sous surveillance. Ce tournant s’inscrit dans le Plan Baignade lancé en 2016 dans la perspective des Jeux olympiques. France Nature Environnement Île-de-France salue cette reconquête de la Seine, mais appelle à rester vigilant sur les conditions sanitaires, écologiques et démocratiques qui l’encadrent.

Le retour de la baignade dans la Seine repose sur d’importants investissements : plus de 1,1 milliard d’euros ont été mobilisés pour moderniser le traitement des eaux usées, améliorer le raccordement des péniches, et construire des bassins de stockage pour éviter les débordements lors des orages. Des capteurs comme le ColiMinder permettent désormais de suivre en temps réel la qualité de l’eau en complément des analyses officielles menées par l’Agence régionale de santé.

Cette réussite est le fruit d’une coopération entre collectivités, opérateurs techniques, services de l’État et associations, et constitue l’un des héritages concrets et positifs des Jeux olympiques de Paris 2024.

Des risques sanitaires encore présents

Malgré ces avancées les risques ne sont pas négligeables. À la suite de fortes pluies début juillet plusieurs sites ont dû être fermés temporairement. Le réseau d’assainissement unitaire reste vulnérable en cas d’épisodes pluvieux intenses favorisant les rejets d’eaux usées dans le fleuve. Par ailleurs, les normes sanitaires actuellement en vigueur au niveau européen ne prennent en compte que deux types de bactéries E. coli et entérocoques intestinaux, sans couvrir les virus, les protozoaires ou les micropolluants chimiques.

Pour FNE Île-de-France ces relevés restent « insuffisants ». « La Seine contient notamment de nombreux virus pour lesquels il n’y a pas d’indicateur », regrette Michel Riottot, président d’honneur de l’association. Hépatite, gastro-entérite, affections cutanées… autant de pathologies qu’on risque d’attraper en avalant trop d’eau contaminée s’inquiète auprès de l’AFP cet ancien ingénieur de recherche du CNRS qui a travaillé sur le microbiote intestinal. Il déplore également « l’absence de mesure de pollution chimique ».

Tandis que d’autres professionnels de santé recommandent aux «personnes vulnérables» qui sont les enfants, femmes enceintes, personnes immunodéprimées d’éviter la baignade en raison de risques persistants.

Un traitement de l’eau à surveiller

La qualité de l’eau ne dépend pas seulement des infrastructures de collecte. Le traitement lui-même suscite des interrogations. À la station d’épuration de Valenton, l’acide performique un désinfectant chimique est utilisé à titre expérimental. Son impact sur la faune aquatique et les écosystèmes demeure insuffisamment documenté. L’engagement dans une reconquête durable des rivières doit aller au-delà des prouesses technologiques et intégrer pleinement la question des rejets chimiques et de leurs effets environnementaux.

Pour une baignade durable, démocratique et écologique

La baignade urbaine ne peut être pensée comme un simple service récréatif ou une vitrine olympique. Elle doit devenir un levier de transformation écologique et sociale. À ce titre les voix citoyennes doivent être pleinement intégrées aux décisions concernant les usages du fleuve.

Dans une tribune publiée dans Le Nouvel Observateur, un collectif de nageuses et nageurs  d’Île-de-France rappelle que l’accès à l’eau n’est ni un luxe ni une lubie de “bobos” mais un enjeu de justice sociale et de santé publique en particulier face aux canicules estivales. Elles et ils appellent à reconnaître la baignade comme un droit d’usage légitime, à renforcer la surveillance sanitaire, à défendre les dernières zones naturelles encore préservées et à imaginer des zones fluviales protégées inspirées des aires marines.

FNE Île-de-France défend une vision de la baignade fondée sur :

  • la transparence totale des données sur la qualité de l’eau, accessibles en temps réel au grand public
  • l’évolution des normes sanitaires pour inclure les virus et les polluants émergents
  • une gestion durable des eaux pluviales, fondée sur la désimperméabilisation des sols, la végétalisation, et des solutions fondées sur la nature (zones humides, phytoépuration, mares urbaines…).
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